PROUD
GayPride 2015 à Sion, travail réalisé pour l'enquête photographique valaisanne
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« JE SUIS FièRE...
FièRE DE TE CONNAITRE,
FièRE DE MARCHER AVEC TOI,
DANSER, RIRE AVEC TOI
FièRE QUE TU EXISTES
FièRE DE DEFILER EN TA COMPAGNIE
FIèRE D'EN FAIRE TROP, D'EN VOULOIR TROP, DE REVER PLUS HAUT, DE REFUSER ET EMBRASSER
FièRE D'IMAGINER QUE LE MONDE N'EST PAS UNE SUITE DE CODES BINAIRES SANS AUTRE ALTERNATIVE. »
Mon concept pour ces images est simple ; plutôt que de photographier ce qui se donne à voir, tenter de donner à voir ce qui regarde. Un jeux de miroirs qui tourne son attention vers le contexte plus que l'événement.
Et entre silence taiseux, artifice et sourires encourageants, participer au défilé et photographier depuis cette posture là, en prenant part.
Que reste-t-il alors à photographier ?
Une foule contrainte, ou solidaire, ou moqueuse, ou contrariée. Une foule passive et immobile, qui regarde sans trop regarder, comme se frôler sans se rencontrer, une parade...
Cette année le thème de la gay pride est à la famille, aux enfants, à la normalité aussi. Je ne connais pas la normalité et ces regards parfois font peur, ceux de l'altérité.
Cette année les prêcheurs sont restés cachés, ceux qui désapprouvent sont restés muets, n'en pensent pas moins mais le laisse en silence là sur une terrasse de café.
Parfois c'est sans doute pire, le silence réprobateur, le jugement d'un regard. Le poids de la honte et du non dit.
Gay pride, la fierté homosexuelle, l'affirmation peut-être simplement du droit d'être soi. Non pas envers mais depuis, non pas au regard de l'autre mais depuis le centre de l'identité de soi, en toute liberté, avec affection. Le temps d'une journée, inverser les normes et regarder ceux qui sont venus regarder. Se regarder soi. Penser ce qui regarde et ce qui est vu. Penser symétrie, penser instant, penser sourire. Alors oui sans doute que la « gay pride » continue à faire avancer les mentalités. Vers où ? On verra bien...
« Les pensées binaires, les pensées du dilemme sont donc inaptes à saisir quoi que ce soit de l'économie visuelle comme telle. Il n'y a pas à choisir entre ce que nous voyons (avec sa conséquence exclusive dans un discours qui le fixe, à savoir la tautologie) et ce qui nous regarde (avec sa mainmise exclusive dans le discours qui le fixe, à savoir la croyance).
Il y a s'inquiéter de l'entre.
Il n'y a qu'à tenter de dialectiser. C'est à dire tenter de penser l'oscillation contradictoire dans son mouvement de diastole et de systole (la dilatation et la contraction du coeur qui bat, le flux et le reflux de la mer qui bat) à partir de son point central, qui est son point d'inquiétude, de suspens, d'entre-deux.
Il faut tenter de revenir au point d'inversion et de convertibilité, au moteur dialectique de toutes les oppositions.
C'est le moment où ce que nous voyons commence juste d'être atteint par ce qui nous regarde – un moment qui n'impose ni le trop-plein de sens (que glorifie la croyance), ni l'absence cynique de sens (que glorifie la tautologie). C'est le moment où s'ouvre l'antre creusé par ce qui nous regarde dans ce que nous voyons. »
Georges Didi-Huberman, « Ce que nous voyons, ce qui nous regarde », Collection Critique, 1992.